SAMAYA X KILIAN JORNET

L’ENTRÉE DE KILIAN JORNET DANS LA SAMAYA FAMILY

 

 
A l’occasion de son entrée dans la Samaya Family, Kilian Jornet nous raconte sa dernière expédition au Népal, ses projets futurs en Himalaya, en France et en Norvège, ainsi que les dessous de l’équilibre entre sa fondation, ses entraînements, sa marque d’équipement de trail running et sa vie de famille.
  
Tu reviens d’une longue expédition au Népal. Qu’est-ce qui t’animait pour réaliser ton projet là-bas ?
 
Kilian Jornet : L’idée de l’expédition était de tenter de réaliser l’arête ouest de l’Everest en un single push en style alpin. Ce que j’aime dans ces projets c’est de se retrouver face à des grands sommets, avec la complexité et la difficulté que l’altitude donne, dans un style comme on peut faire dans les Alpes, avec des ascensions légères en partant du dernier village, souvent en single push ou sinon en portant tout le matériel sur moi, pour grimper la montagne sans aucune aide externe, mais uniquement avec mes capacités physiques et techniques, dans la forme la plus pure possible pour affronter une ascension.
 
Comment s’est déroulée ton ascension du West Ridge ?
 
KJ : J’ai fait une acclimatation assez rapide. On s’est installés à Namche Bazaar en famille et j’ai pu toucher 6700m en partant de Namche à la journée. Puis on s’est installés à Pheriche, à 4300m, d’où j’ai pu faire encore 3 rotations, la dernière en touchant presque les 8000m au Geneva Spur. Pour ces rotations, je partais de Pheriche et je portais ma Samaya ASSAUT2 ULTRA que j’installais au camp 2 de la voie normale. J’ai fait toute l’acclimatation sur la voie normale pour aller à l’arête ouest à vue, ce qui apporte plus d’émotion à l’ascension puisqu’on découvre le chemin pendant le push. Mis à part un fort virus qui m’a laissé une semaine à plat pendant l’acclimatation, le reste s’est très bien passé et finalement, le 20 mai, j’ai commencé mon attaque. En partant de Pheriche, je suis monté au camp de base où j’ai passé une nuit. Le 21 au matin, je suis parti après le petit déjeuner pour arriver au camp 2 où je me suis reposé pendant la journée dans la tente ASSAUT2. Ça me permettait d’attendre que le soleil disparaisse pour affronter la montée à la West Shoulder dans la nuit, tout en évitant un risque majeur d’avalanches et chutes de pierres. Quand je grimpais la nuit, j’évitais de porter plus de matériel et j’allais au plus léger. Je suis donc parti à 17h du camp 2 pour rejoindre le couloir de 1000m qui mène à l’arête ouest. C’était laborieux, avec de la glace vive et de la neige très fraiche, j’ai mis 10h ! Arrivé à l’arête, le vent soufflait fort donc je me suis mis à l’abri sous une corniche pour attendre la levée du jour et que le vent descende. L’arête était en condition parfaite, de la neige dure. C’est une voie très très belle et variée. C’était aussi très beau d’être tout seul, quand on voyait les queues sur les voies normales du Népal et du Tibet. Arrivée au pied du Hornbein à 8000m, j’ai fait une petite sieste de 30 minutes en profitant de la chaleur du soleil puis j’ai commencé à grimper le couloir. Après 200m, quand le couloir s’élargissait à nouveau, il y avait pas mal de pochettes de neige. J’en ai cassé une et je suis tombé d’une cinquantaine de mètres avant de m’arrêter. En voyant les conditions de cette zone, j’ai finalement décidé de faire demi-tour. Même si je me sentais très bien, le risque d’avalanche était trop grand pour moi. La descente n’était pas simple, il a commencé à neiger fortement, faisant disparaître mes traces. Avec une visibilité de peu de mètres, j’ai dû faire toute la descente en suivant ma trace GPS de la montée, puis désescalader le long couloir en glace vive pour atteindre à nouveau ma tente au camp 2, après 30h de push. Là j’ai fait une nuit, puis pris tout le matériel et je suis redescendu le matin suivant jusqu’au camp de base.
  
Quels sont tes critères de choix pour ton équipement sur tes différents projets en bivouac ?
 
KJ : J’avais du matériel pour l’acclimatation et le camp 2, où je voulais être confortable tout en étant capable de porter sur moi, donc le poids et volume sont très importants. C’est pour ça que j’ai choisi la tente ASSAUT2 ULTRA. J’ai pris un matelas gonflable léger et un sac de couchage assez fin (-15°C), donc je dormais avec mes doudounes, ce qui me permettait d’avoir moins de poids et de rester au chaud.
 
Pour tes prochaines expéditions, tu envisages de partir avec une RADICAL1 pour encore plus de minimalisme et sa large ouverture. Sais-tu déjà où tu souhaites l’emmener ?
 
KJ : Oui, pendant un single push en style alpin le poids est fondamental. Même si la différence entre l’ASSAUT2 ULTRA et la RADICAL1 n’est que de 400g, cela représente une grande différence ! En plus, cela peut permettre des bivouacs en confort en cas de mauvais temps ou vent lors de longs enchainements.
 
Ta pratique du bivouac est très polyvalente. Tu le pratiques aussi bien lors de tes expéditions engagées que lors de sorties familiales. Peux-tu nous en dire plus sur la transmission de la pratique du bivouac que tu effectues avec tes filles ?
 
KJ : On adore partir en montagne avec les filles, aller marcher un peu et passer une nuit en tente, écouter les sons de la forêt, des animaux qui chantent la nuit… C’est une expérience géniale pour tous. On a quelques projets ici en Norvège cet été, avec la Samaya2.5 qu’on utilise beaucoup en famille et qu’on adore !
 
Qu’as-tu prévu pour la suite ?
 
KJ : J’ai une liste de projets que je souhaite réaliser, mais je ne sais pas encore dans quel ordre exactement je vais les faire. En tous cas, il y aura à la fois des projets avec des nuits en montagne, dans lesquels j’intégrerai le bivouac, mais aussi des projets d’expédition en one push. J’aimerais tenter des enchaînements à très haute altitude, que j’imagine faire en dormant une ou deux petites nuits pour me reposer. Je ne sais pas encore si je partirai seul ou si je trouverai quelqu’un qui soit motivé et qui accepte un engagement aussi énorme. Je compte aussi revenir en France en août pour la Sierre-Zinal et l’UTMB.
 
En parallèle de ces projets et du lancement de NNormal, comment fais-tu pour concilier ton entraînement et le temps que tu consacres à ta fondation ?
 
KJ : J’essaie de bien compartimenter tout ça. Pour la fondation, il y a une personne employée qui y travaille tous les jours, et puis il y a des projets sur lesquels je suis plus impliqué et pour lesquels je passe aussi du temps chaque jour. Il y a aussi ma mère qui aide beaucoup et qui s’occupe de toute la partie éducation, notamment en Espagne. Pour ce qui est de NNormal, je ne suis pas tout seul à gérer tout cela. On est deux associés et une équipe d’une quinzaine de personnes très impliquées.

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