SAMAYA x SYMON WELFRINGER
CONFIDENCES SUR LA PRÉPARATION DE SON EXPÉDITION AU PAKISTAN
Après son ascension spectaculaire aux Grandes Jorasses en février 2023, l’alpiniste Symon Welfringer part relever un nouveau défi au Pakistan. En amont de son voyage, Symon nous livre la genèse de ce projet, la façon dont il s’y prépare et ce qui le motive à repousser sans cesse ses limites.
Qu’est-ce qui t’a inspiré pour te lancer dans cette expédition au Pakistan ?
Symon Welfringer : On est une équipe de 4 à partir au Pakistan fin juin, avec Matteo Della Bordella et Silvan Schüpbach, 2 potes avec lesquels je suis déjà parti au Groenland en 2021, et François Cazzanelli. On part dans une montagne, le Baintha Brakk, surnommée l’Ogre. Son sommet principal, à 7200 mètres, a déjà été grimpé deux fois, mais son sommet est, à 7300 mètres, est totalement vierge. Ce qui est particulier, c’est son pilier sud-est, qui suit vraiment la ligne de crête et qui donne des longueurs de grimpe vraiment chouettes. C'est un endroit hyper sauvage donc ça fait partie des voies qui font rêver. Ça faisait un moment que j’avais ce projet en tête.
Cette ascension implique de passer plusieurs nuits sur la falaise. Comment as-tu prévu d’organiser ton bivouac ?
SW : C’est beaucoup moins raide que la face nord des Grandes Jorasses, on espère donc que ça puisse marcher avec deux tentes de deux places chacune, parce que dormir là-haut sans tente c’est un peu compliqué. L’idée est de pouvoir utiliser au maximum les tentes pour pouvoir se préserver et contrer le vent qui est très présent en altitude, ainsi que le froid.
On espère que vous aurez suffisamment de place pour installer votre bivouac. Concernant votre progression sur cette expédition, comment vous projetez-vous ?
SW : Les 15 premiers jours, on sera sur le Choktoi Glacier et on va progressivement monter en altitude pour essayer de s’acclimater, jusqu’à 6000-6500 mètres. On va prendre les skis et passer par des itinéraires assez faciles. L’idée est de dormir au moins une fois à 6500 mètres avant d’aller dans la voie. On espère ensuite pouvoir faire l’ascension en 4 jours.
As-tu des appréhensions par rapport à cette expédition ? Sens-tu des limites ?
SW : Je pense que ça ne marche pas tout le temps. C'est aussi là que ça devient dangereux, quand tu prends vachement confiance en toi. Quand je suis rentré du Pakistan avec Pierrick et qu'on avait eu le piolet d'or, c'est à ce moment que j'ai eu un accident en cascade de glace. Je pense que j'avais trop confiance en moi. Là je sens que j'ai un peu d'expérience, donc je sais que potentiellement ça peut ne pas marcher, mais d’un autre côté, au fond de moi, j'ai trop envie que ça marche. Peut-être aussi que parfois je suis parti avec trop de questionnements. Comment tu expliques ça à tes proches, tes potes, ta copine ? C’est hyper complexe. C’est là que je me pose la question de ce qui me motive, malgré les risques. Ce n’est pas pour la gloire, mais vraiment pour l’aventure, les sensations que je ressens là-bas. Même s’il fait moche et que je suis dans ma tente en train de regarder des séries Netflix, au fin fond d’un glacier, c’est ça qui m’anime.